Quelle claque que ce premier roman de Stephan Markley, le genre qui vous laisse un peu assommé une fois la dernière page achevée. Originaire de l’Ohio, Markley appartient à cette génération – il a 35 ans, qui a vu son pays basculer après le 11 septembre, une génération qui a connu la guerre, la crise des subprime, le déclin économique, la montée du populisme, l’explosion de l’usage des opioïdes,… Ohio, c’est justement l’histoire de quatre trentenaires, anciens élèves du lycée de New Canaan, qui se retrouvent par hasard réunis dans cette petite ville où ils ont grandi. Par hasard, oui mais pas tout à fait, car de bonnes raisons de revenir à la « maison », ils en ont tous les quatre : tout ce qui s’y est vécu -les amours, les addictions, les traumatismes et les mauvais choix, marque encore aujourd’hui leur vie et éclaire leur présence ce soir-là.
Ohio réussit la prouesse d’être à la fois un roman à suspens, mais également un grand roman politique. En explorant successivement le passé de chacun des protagonistes, Stephan Markley nous fait découvrir une jeunesse paumée, une Amérique déboussolée, meurtrie, prête à se laisser gouverner par des leaders qui encouragent la violence et prônent des solutions simplistes. Une claque par le contenu donc, mais aussi une claque par la qualité littéraire. Par la construction de l’intrigue et par cette écriture qu’on pourrait qualifier de magnifiquement noire, agressive et crue, mais jamais loin de la poésie non plus, qui porte au mieux le lecteur dans ce climat réaliste et sombre qu’est celui de New Canaan, Ohio.
Un premier roman (up)percutant qui demande à être apprivoisé à la lecture des première pages mais qui ne peut plus être lâché lorsque les pièces de l’intrigue se mettent progressivement et terriblement en place!
Gregory R.
Publié en août 2020, traduit de l'anglais (américain) par Charles Recoursé. Existe aussi au format numérique.